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Wednesday, August 19, 2020

Les comptes en bitcoins débarquent aux Etats-Unis, une étape clé pour les cryptomonnaies - L'Echo

kuncikn.blogspot.com

Les cryptomonnaies ont à nouveau le vent en poupe. La demande va croissante si bien que le régulateur Américain du monde bancaire, l’Office of the Comptroller of the Currency (OCC), vient d’annoncer qu’il permettait désormais aux banques Américains de détenir des bitcoin pour leurs clients.

Le régulateur bancaire américain vient de définitivement autoriser les banques américaines à proposer des comptes en bitcoin à leurs clients. Ce régulateur, l’office of the comptroller of the currency (OCC), a pourtant dans ses prérogatives la lutte contre le blanchiment de l’argent et le financement du terrorisme de même qu’il doit veiller à assurer un fonctionnement sûr du système bancaire américain. Comment dès lors en est-il donc arrivé à cette décision ?

Les cryptomonnaies sont, à la fois, d'une part, une monnaie-papier traditionnelle, sans valeur intrinsèque, acceptée par la simple confiance, sauf que pour la première fois il n’y a pas un gouvernement ou une institution qui garantit cette confiance (c’est le cas par exemple des bitcoins); et d'autre part, une monnaie qui a une valeur intrinsèque réelle puisqu’on peut l’échanger contre des dollars, par exemple, ou des commodités (c’est le cas des stablecoins).

Si les banques américaines peuvent donc désormais conserver pour leurs clients la cryptomonnaie la plus connue, à savoir des bitcoins, elles devront aussi s’adapter à une technologie qui vise précisément à… s’affranchir des banques.

Pas de clé, pas de bitcoin

Cette technologie c’est le chiffrement, avec comme corollaire la détention de clés qui permettent d’échanger des bitcoins entre particuliers. Parallèlement, une base de données sous forme de blockchain, répliquée par de multiples ordinateurs, conservent la chronologie des transactions en bitcoin de manière inaltérable, sûre et non manipulable. Cela signifie que si l’on perd ces clés, on perd l’accès à ses bitcoins. Autrement dit, si un tiers détient votre clé, il peut transférer vos bitcoins.

Le bitcoin, la plus emblématique des cryptomonnaies, a déjà acquis ses lettres de noblesse. Il existe en effet déjà des fonds en bitcoins ; on peut également échanger des bitcoins et des cryptomonnaies sur diverses places de marchés. On dénombre ainsi aujourd’hui quelque 40 millions d’Américains qui possèdent des cryptomonnaies.

Autant dire qu’il y a une réelle demande pour créer des comptes en bitcoin. Suivant ce raisonnement, l’OCC estime que le rôle des banques doit aussi pouvoir être de détenir, pour le compte du client, les clés de chiffrement qui atteste leur possession. Et si les conseils en investissement incluent, comme c’est de plus en plus le cas, des investissements en bitcoins, il leur faudra prévoir un intermédiaire pour les gérer comme les banques le font déjà en matière d’actions ou d’obligations.

"Les banques ont de tout temps joué un rôle d’intermédiaire financier dans les dépôts de cash, les paiements et les prêts. Dès lors, pourquoi ne pourraient-elles pas en faire de même avec le bitcoin?"
Charles Cuvelliez et Jean-Jacques Quisquater
Ecole Polytechnique de Bruxelles (ULB) et Ecole Polytechnique de Louvain (UCL)

Ce ne sera toutefois pas simple. Pour l’instant, les clés sont stockées dans un portemonnaie électronique individuel qui est, soit connecté à Internet, donc facilement accessibles mais susceptibles d’être piraté, soit présent en dehors d’internet, ce qui est plus sûr mais quelque peu coupé du monde.

Les banques ont de tout temps joué un rôle d’intermédiaire financier dans les dépôts de cash, les paiements et les prêts. Dès lors, pourquoi ne pourraient-elles pas en faire de même avec le bitcoin, s’interroge l’OCC. Au travers de ce rôle d’intermédiaire, les banques facilitent en effet la circulation de l’argent et gère les risques de leur conservation.

Service de garde puis de dépôt

Depuis toujours, les banques proposent des services de dépôt à l'égard d'une vaste gamme d’actifs, qu’ils soient physiques ou électroniques, comme des titres ou de l’argent, et bâtissent ensuite des services autour (paiement, …). C’est leur cœur du métier. A côté, les banques proposent aussi un service de garde pour d’autres actifs qui n’ont rien à avoir avec les produits qu’elles proposent, comme des objets précieux, des titres de propriétés (éventuellement dématérialisés), des bijoux ou de l’or.

Pour l’OCC, en conservant les clés cryptographiques des bitcoins de leurs clients, les banques continueront d'être en phase avec ces deux piliers : un service de garde des clés comme on garde des titres de propriété dans un coffre-fort et, graduellement, un service de dépôt au fur et à mesure que la banque va étoffer son offre de services autour des bitcoins .

En réalité les régulateurs ne se sont jamais prononcés sur le type d’actif qu’une banque peut conserver pour ses clients pourvu que ce soit légal. Donc, pourquoi pas ses clés cryptographiques, un actif comme un autre, finalement plus proche du métier des banques que de stocker dans un coffre un tableau ancien.

La promesse du bitcoin bafouée ?

De manière pratique, l’OCC va laisser le choix aux banques sur la technique choisie, en fonction de son expertise mais aussi de son appétit ou non au risque.

Soit la banque reçoit une copie de la clé privée du client qui en garde une aussi, ce qui lui permet de faire encore ce qu’il veut (comme quelque chose placé dans un coffre-fort qu’on vient rechercher quand on veut), soit la banque détient seule la clé. Elle gère alors le bitcoin à la place du client, en suivant ses instructions, un peu comme un compte en banque sur lequel on dépose son cash auquel on n’a alors plus accès. A charge désormais aux banques de mettre en place un monitoring des risques liés à ce nouveau service. De toute évidence des formes nouvelles d’audit mais aussi de lutte contre le blanchiment sont à inventer.

Au final, d’aucuns regretteront que les banques viennent se mêler des bitcoins dont la raison d’être, la promesse ultime était justement de se défaire des intermédiaires. Sauf que le bitcoin a besoin de contact avec le monde réel et que manifestement cela ne se passe pas toujours très bien.

On pense notamment aux multiples piratages de plate-forme d’échange de bitcoin mais pas seulement. Rappelons-nous de la mésaventure des clients de la plate-forme QuadrigaCX. Son PDG et fondateur était mort brutalement. Problème : il était le seul à détenir les clés de sécurité des portefeuilles de la firme. 188 millions de dollars en cryptomonnaies y sont défensivement bloqués et 115.000 clients sont actuellement toujours désespérés…

Charles Cuvelliez, ULB, Ecole Polytechnique de Bruxelles
Jean-Jacques Quisquater, UCL, Ecole Polytechnique de Louvain




August 20, 2020 at 10:10AM
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