Pour le président de Saint-Gobain Distribution Bâtiment France, la reprise s'annonce vigoureuse à court terme. Pour la suite, l'importance réaffirmée de l'habitat ouvre des perspectives.
Négoce - Comment le groupe SGDB France a-t-il traversé la période de confinement ?
Patrice Richard -Nous avons traversé cette période avec une double responsabilité : protéger la santé de nos équipes et de nos clients, et approvisionner les chantiers. Une semaine après le confinement, 50 % de nos agences étaient ouvertes. Nos collaborateurs ont fait preuve d'une grande agilité, et, grâce à eux, nous avons pu nous comporter en leader solide et responsable.
Le cross-canal a fortement évolué durant la période.
Quelles transformations avez-vous opérées dans vos enseignes ?
Nous sommes passés en mode drive ou livraison à 100 % durant le confinement, en modifiant notre façon de travailler. Nos ventes en e-commerce ont été multipliées par 6, représentant jusqu'à 90 % des ventes de La Plateforme du Bâtiment ! À présent, à nous de trouver le bon dosage entre le digital et le relationnel. Les outils digitaux resteront à un haut niveau, mais nous devons aussi rester attentifs au rôle de conseil et à la relation humaine dans le point de vente.
La période de confinement a été l'occasion d'accélérer le déploiement de services en préparation. Ainsi, notre système de paiement à distance a remporté un grand succès. De même, nous avons déployé, pour nos salles d'expo, un système de prise de rendez-vous avec préqualification de la visite, qui fait gagner beaucoup de temps à nos clients.
Le télétravail s'est-il imposé ?
Le télé travail fonctionne quand tout le monde s e connaît, et permet d'avancer sur des sujets simples et connus. C'était adapté durant la crise, pour confiner, sécuriser les outils informatiques, garantir le moral de nos collaborateurs. Mais il limite le champ d'action. Un dosage à 60 % en présentiel et 40 % en télétravail me paraît une bonne chose. Il faut rester présent pour accueillir les entrants, constituer des groupes de travail, aborder de nouveaux sujets.
Vous êtes présents sur presque tous les marchés de la construction. Avez-vous constaté des différences ?
Nous avons observé une déformation de notre mix produits et de notre pyramide clients. Les petites entreprises, actrices de la rénovation, ont continué presque tout le temps du confinement. Les grandes entreprises ont été plus lentes à repartir. De même, en termes de produits, les solutions pour l'extérieur (gros œuvre, aménagements extérieurs, couverture… ) ont vite repris, contrairement aux produits à installer chez des particuliers (aménagement intérieur, plomberie, électricité). Mais nous sommes désormais, et depuis début juin, revenus dans une situation équivalente à celle d'avant la crise et avons retrouvé un niveau d'activité normal.
L'activité est-elle revenue à la normale ?
Nous vivons des semaines avec un niveau intense d'activité. La filière construction a accumulé un bon mois de retard - davantage dans les grandes entreprises que dans les petites. Elles le rattrapent, mais cela prendra du temps : les entreprises ne peuvent pas travailler à 150 % ! L'activité tiendra ensuite grâce aux carnets de commandes d'avant le confinement. Pour accompagner ce mouvement, nous avons ouvert nos enseignes durant les jours fériés depuis le 11 mai, ainsi que les samedis, et nous prévoyons un dispositif renforcé, notamment en août. Les difficultés d'approvisionnement redoutées durant le confinement ne sont pas advenues.
Qu'en est-il désormais ?
Durant la crise sanitaire, nous avons porté une attention particulière à la relation avec nos partenaires fournisseurs. Nous les avons régulièrement informés de nos ventes, de nos stocks et de nos prévisions économiques. Nous n'avons pas été opportunistes, nous avons continué à travailler avec nos partenaires historiques et nous les avons payés en temps et en heure. On ne peut pas se permettre d'avoir des ruptures maintenant ! Nous comptons sur la filière industrielle pour nous aider et devons travailler de façon encore plus étroite avec eux. Nous devons garder les voiles sorties, la disponibilité des produits sera un point clé dans les mois à venir.
« Nous tablons sur six mois d'activité soutenue, du fait du retard à rattraper. Ensuite, la situation est plus difficile à estimer. »
Comment envisagez-vous l'activité dans le secteur à moyen terme ?
Comme je le soulignais précédemment, nous tablons sur six mois d'activité soutenue, du fait du retard à rattraper. Ensuite, la situation est plus difficile à estimer. Le tertiaire a beaucoup souffert, et le neuf connaîtra un trou d'air du fait de l'arrêt de la délivrance des permis de construire durant plus de deux mois.
Quels signaux positifs identifiez-vous ?
Sur le site d'inspiration grand public La Maison Saint-Gobain, le nombre de visiteurs a explosé durant le confinement ! Cette fréquentation traduit l'envie de maison individuelle et le besoin d'aménager son habitat. À l'heure où les loisirs sont entravés par la fermeture des frontières et par peur collective, l'habitat devient une valeur clé.
Croyez-vous à une revanche des campagnes françaises sur les métropoles ?
Je reste assez prudent sur ce sujet. La population a, globalement, besoin d'être connectée aux services de santé, aux loisirs, aux commerces. Je ne crois pas à une grande décrue des villes, mais davantage à un essor des banlieues et des villes moyennes. De ce point de vue, l'intérêt devrait se trouver confirmé pour les immeubles en R+3 à R+5, qui ne présentent ni les inconvénients de la maison individuelle ni ceux du collectif.
Quid de la rénovation énergétique, que beaucoup donnent comme un axe majeur de reprise ?
Ce sujet relève d'un mix entre la prise de conscience et les mesures économiques. La prise de conscience est mondiale : on ne peut pas continuer ainsi, dans un monde de pandémies et de canicules. La rénovation énergétique, dans les esprits, est désormais sur le même pied que l'agrandissement ou l'embellissement du logement. Reste à l'accompagner et à l'encourager, et nous y travaillons avec le gouvernement afin de bien calibrer le plan de relance, avec des mesures pour les plus fragiles et des CEE mieux positionnés. La question porte également sur le dosage entre les aides à 100 % pour les plus fragiles et celles pour les ménages aisés, qui ont été sortis des dispositifs récemment. Il faut faire feu de tout bois pour que la rénovation énergétique fonctionne ! Et sans doute simplifier encore les aides financières, pour aller enfin vers un vrai guichet unique.
SGDB France a affirmé son positionnement de partenaire des petites entreprises ces dernières années. Comment aiderez-vous ces dernières à traverser la crise économique ?
En effet, les petites entreprises sont le cœur de notre stratégie. Durant la crise en W de 2008-2009 à 2015, elles se sont montrées résilientes et agiles. Je ne vois pas arriver de situation catastrophique concernant leur santé financière suite à la pandémie. Mais nous ferons en sorte d'être toujours plus proches et toujours plus accompagnants. Notre ambition autour de la RSE nous conduit à former nos clients, à leur proposer les bons produits et à les aider pour traverser la crise.
July 01, 2020 at 12:46PM
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« L'habitat devient une valeur clé » - Moniteur
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